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Le blog du Niphargus déchaîné

HISTOIRE d’HO


Trop c’est trop, il est temps de déterrer le « h » de guerre ! Nous disons bien le « h », première lettre si discrète du mot « hache » qui en contient deux…

En décembre 1995 naissait la « Communauté de communes de l’Orthus » (sic), une simple petite faute d’inattention dans un formulaire officiel allait devenir aujourd’hui la plus vulgaire ineptie orthographique de notre département. Quatorze ans déjà ! Ne serait-il pas temps de corriger enfin cette bourde ridicule ?

Après des siècles de langue latine et occitane, où le mot « ortus » s’écrivait sans « h », vint le temps de la mode des « h » muets accolés au début de nombreux toponymes et patronymes. Notre Ortus était devenu Hortus et personne ne s’en plaignit à l’époque, tant l’écriture était réservée à une élite savante.

Vint enfin l’homme instruit et post-moderne de la fin du XXe siècle. Celui-ci, connaissant ses faiblesses linguistiques, se laissa hypnotiser (avec un « h » au début) par le mot « orthographe » (fourré avec deux vrais « h » à l’intérieur). Sachant qu’il rencontre souvent quelques difficultés avec notre belle langue, notre homme grave dans son hémisphère gauche (trois « h » à eux deux), celui de la mémoire à long terme, ces quelques lettres tant anxiogènes : ORTH. Ce terrifiant « orth » qui annonce les sueurs froides et les angoisses de la dictée de Pivot. Sur sa lancée, tel un héraut (avec un « h » au début) de la linguistique, il y ajoute « orthophoniste, orthoptie, orthodontie, orthèse, orthite et orthorhombique ». Le voilà paré, plus rien ne lui fait peur désormais. Il est fin prêt à écrire avec « orth » tout ce qui ressemblera de près ou de loin à ce répertoire aux racines grecques si patiemment amassé.

Et le premier mot qui en fera les frais sera celui de notre Causse, de sa majestueuse falaise et de sa grotte mystérieuse qui attendent depuis le Crétacé que l’homo orthographicus s’intéresse à leur nom. Par petites touches, de-ci de-là, vont naître des « Orthus » qui ne sont que des chimères issues du croisement contre nature de l’Hortus originel avec un mot quelconque bloqué entre deux synapses mémorielles. Snobisme volontaire ou vraies coquilles ? Cette version frelatée finira tout de même par se retrouver sur des panneaux de signalisation touristiques, des logos, des flyers, des papiers officiels, des publications intercommunales et le site Internet de la « Communauté de communes -dite- de l’Orthus ».

Que faire ? Impossible de corriger nous dira-t-on : cela coûterait-il trop d’amour-propre à certaines personnes de reconnaître leur erreur ? Il n’y a pourtant aucune honte (avec un « h » aspiré) à faire parfois quelques fautes en écrivant notre langue, si belle mais aussi si subtile. Alors quoi ? Le coût des corrections, désormais fort nombreuses, serait-il pharaonique (avec «ph ») pour si peu de chose ? Malgré toutes ces difficultés, rien ne justifie que l’on doive s’en satisfaire.

D’ailleurs, qu’à cela ne tienne : pourquoi s’arrêter en si bon chemin ? Courage chers amis, ne bridez pas votre imagination ! À l’instar d’un édile local qui voulut un jour rebaptiser notre région, déstructurez aussi tous les autres patronymes des environs.

Vous naviguerez enfin sur le fleuve « Érhault » et traverserez le joli village d’Érhepian. Pourquoi se limiter aux « h » initiaux ? Revisitez sans vergogne « Paulahn », « Saint Guillehm le Désert », « Saint Matieuh de Tréviers », « Pahillès », « Pardhillan », « Vhaillauquès », « Espondeillahn » et « Fouzhillon »…

Et pour boucler la boucle, rectifiez encore l’adresse de la fameuse Communauté de Communes sise désormais Place de l'« Ermeth » à Claret.

Amis des lettres et de l’Hortus, réhabilitons le « h » : non aux Orthus Gaffeusement Modifiés !

Rabachol porte-parole du "h" muet.

Bibliographie :

DAUZAT (A.) - Les noms de lieux. DELAGRAVE, 1926

LEBAIGUE (CH.) - Dictionnaire Latin / Français, BELIN, 1937

ROSTAING (C.), DAUZAT (A.) - Dictionnaire étymologique des noms de lieux de France, LAROUSSE, 1963

RAYNAUD DE LAGE (G.) - Introduction à l’ancien Français, SEDES Paris V, 1968

Dr LEMOINE (J.) -Toponymie du Languedoc et de la Gascogne, A. & J. PICARD, Paris, 1975

FABRE (P.) - L’affluence hydronymique de la rive droite du Rhône, CENTRE d’ÉTUDES OCCITANES, UER Montpellier III, 1980

NOUVEL (A.) - Les noms de lieux témoins de notre histoire, TERRA D’OC, 1981

BAYLON (CH.), FABRE (P) - Les noms de lieux et de personnes, NATHAN, 1982

HAMLIN (F.R.), CABROL (A.) - Les noms de lieux du département de l’Hérault, LACOUR, Nîmes, 1983

VIAL (E.) - Les noms de villes et de villages, BELIN, 1983

ALIBERT (L.) - Dictionnaire Occitan / Français. INSTITUT d’ÉTUDES OCCITANES, Toulouse, 1985 (1966)

NEGRE (E.), DAUZAT (A.) - Toponymie générale de la France. (3 vol.) DROZ, Genève, 1990 / 1991

Abbé BOUGETTE (E.), DOUMERGUE (B.), - Histoire du Pays de Londres, FOYER RURAL de St MARTIN, 1991

DUBOIS (J.) , DAUZAT (A.) , MITTERAND (H.) - Dictionnaire étymologique et historique du français, LAROUSSE, 1994

FABRE (P.) - Noms de lieux du Languedoc. BONNETON, 1995

MACAIRE (P.), LENGLIN (M.) – Noms de lieux et de personnes du Val de Londres. LE PLEIN DES SENS, 1997

BOINET (N.) - Inventaire spéléologique du Causse de l’Hortus, EXPLOKARST N°4, CLPA, Montpellier, 2002

 

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