
Millau
: ça souffle aux Quatre-Vents
MARIE MASSENET
Au-dessus
de la Dourbie, l'Alpina explore une nouvelle cavité majeure,
sous le causse du Larzac.
Au départ,
il y a eu les quatre-vingts ans de l'Alpina. Le club fêtait
son anniversaire à La Salvage, sur le Larzac, en juin 2014.
Pour faire "visiter le coin", Jean-Louis Rocher, membre
du club de spéléo millavois, 56 années au compteur
dont 42 de pratique en spéléologie, avait organisé
une petite balade. Sur terre. Mais évidemment, lui et sa troupe,
les oreilles dressées et le nez en éventail, guettaient
plutôt les trous et leurs fameux courants d'air, ceux qui indiquent
"qu'il pourrait bien y avoir quelque chose dessous".
Un bien
joli nom
C'est comme ça qu'entre Jassenove et Lamayou, à quelques
centaines de mètres à vol d'oiseau de Pierrefiche, la
joyeuse troupe a trouvé un souffle au sommet d'un petit monticule.
La légende populaire racontera peut-être que c'est cette
petite surélévation qui valu à la plus profonde
des grottes du Larzac aveyronnais de s'appeler les Quatre-Vents. Un
bien joli nom que Jean-Louis Rocher doit en vérité aux
“quatre-vingts” ans de son club.
MATERIEL
Pour ces expéditions répétitives, Jean-Louis
Rocher et ses collègues partent plutôt légers.
Ils laissent dans la grotte les cordes installées et une partie
du matériel qu’ils utilisent. Il leur faut donc à
chaque fois :
- une combinaison technique, qui tient chaud et sèche vite,
recouverte d’une combinaison qui résiste à l’abrasion
- un casque
- une lampe à led
- des cordes de remplacement
- une perforatrice
- un baudrier, des mousquetons
- de quoi faire un point chaud en cas de refroidissement ou d’accident,
avec une couverture de survie ou un poncho spécial et des bougies
de chauffage
- de l’eau
- un pique-nique, contenant, au moins, de la charcuterie, du fromage,
des fruits secs, des amandes, du café soluble et un réchaud.
Il faut ce qu’il faut !
Les spéléos
atteignent 330 mètres sous leur point de départ
Depuis cette date, une cinquantaine d'explorations ont mené
des groupes de deux à cinq personnes à descendre dans
un trou qui s'est avéré exceptionnel. Aujourd'hui, les
spéléos atteignent 330 mètres sous leur point
de départ. Ce n'est pas une prouesse en spéléo.
On descend dans ce monde à près de 2000m sous terre,
1 600m en Haute-Savoie. Mais c'en est une pour le Larzac, qui ne compte
pas de descente similaire sur cette partie du plateau. Et pour l'ensemble
des grands causses, dont les cavités ne dépassent pas
400 m de profondeur.
Une série
de salles blanches ornées de magnifiques concrétions
Au fond, les explorateurs sont à 100 m au-dessus du niveau
de la source de Laumet, qu'ils rêvent de rejoindre. Pour l'instant,
les cavités explorées sont assez sèches. Seul
un mince filet d'eau coule. Celle-ci rejoint forcément un réseau.
Sera-t-il possible de le visiter ? C'est toute la question. Les galeries
sont loin d'avoir montré tous leurs secrets. Mais elles ont
déjà offert des merveilles.
Une cavité
majeure et atypique pour la région
Les deux kilomètres de souterrains découverts abritent
notamment, à -70m, un enchaînement de salles magnifiques.
Les équipes ont disposé de petites clôtures pour
baliser un chemin afin de ne rien abîmer. Sur 40 m de long,
20 de large et l'équivalent en hauteur, tout est blanc, vierge,
orné de décorations splendides. Ce qui fait déjà
des Quatre-Vents, avec sa profondeur et sa configuration, une cavité
majeure et atypique pour la région. Et ce n'est pas fini. Jean-Louis
Rocher et ses collègues y retournent une ou deux fois par mois.
"Ça souffle encore, en bas..."
----------
Il n’y a pas de niveaux en spéléo, à
l’inverse de l’escalade, par exemple. La profondeur n’est
pas un critère de difficulté. Celle-ci naît plutôt
de l’étroitesse des passages, des conditions ou de la
durée des descentes. Il faut supporter d’avancer à
quatre pattes avec un sac-à-dos, dans le froid, mouillé.
Le trou des Quatre-Vents n’est "clairement pas accessible
aux débutants", sourit Jean-Louis Rocher. "Par contre,
on gagne beaucoup de temps et d’énergie en l’ayant
fait de nombreuses fois. Quand on y retourne, on sait exactement où
mettre les pieds, comment faire passer son sac quand c’est difficile..."
Bref, une vraie sinécure.
----------
|